C’est une surprise ! Si la crise a eu des effets négatifs qu’on ne citera pas ici tant ils sont connus et ont été commentés dans la presse ces derniers mois, il est un effet que nous n’aurions pas soupçonné : l’amélioration des délais de paiement inter-entreprises. Retour sur une bonne surprise de l’année 2020, dont les effets se poursuivent en 2021.

Entretien avec Patrick Barbeau, Directeur des Opérations Crédit Mutuel Factoring.

« Le comportement des sociétés a changé pendant cette crise. »

Oui, en 2020, les délais de paiement constatés sur l’ensemble des factures gérées par nos équipes de recouvrement ont finalement été contenus. Un phénomène fortement lié à l’environnement favorable créé pour les entreprises notamment par les PGE accordés mais pas seulement. N’oublions pas non plus les excédents de trésorerie des secteurs moins ou non touchés, le comportement responsable des plus grands groupes vis-à-vis des PME et des plus petits, et l’impact des amendes infligées par les pouvoirs publics aux mauvais payeurs, qui ont également marqué les esprits.

Un contexte qui a donc permis, après des délais en forte hausse au 2nd trimestre 2020 et des retards supérieurs à 30 jours multipliés par 4, d’assister, à partir du mois de juin 2020, à une décrue progressive pour et revenir en août aux niveaux équivalents de 2019, jusqu’à atteindre des niveaux inférieurs depuis le mois de septembre 2020.

En effet, les retards constatés au 4ème trimestre 2020 ont été très bons et inférieurs en moyenne de 20 % à ceux de la même période des années précédentes, avec des taux records enregistrés à fin décembre.

Une tendance qui se confirme sur le 1er trimestre 2021.

« Sur les clients nous ayant confié la gestion de leur poste clients, nous constatons une détente persistante et de faibles niveaux de retards avec un DSO à fin mars 2021 d’une durée d’environ 51 jours. C’est 5 jours de moins par rapport à mars 2020. »

Autre constat, le contexte aura également accéléré l’utilisation des virements comme moyen de paiement privilégié en B2B dans 80% des cas au détriment des chèques et traites en recul constant.

« Vers une reprise de l’activité mais un rattrapage des faillites attendu sur les prochains mois... »

Attention, tout n’est pas rose pour autant. Nous pouvons logiquement nous attendre à une remontée des retards et des DSO à partir du 3ème quadrimestre de l’année ainsi qu’à une tension sur les secteurs d’activité les plus fragiles lorsque les aides s’arrêteront. Un rattrapage des faillites est d’ores et déjà annoncé en mars et touche désormais les TPE. Avec 7.406 défaillances enregistrées au 1er trimestre 2021 (source Altares), le chiffre était jusqu’à présent en baisse de 32% mais on assiste à une très forte hausse des procédures et en particuliers des liquidations judiciaires directes sur le mois de mars qui représentent à elles-seules ; ces dernières représentent d’ailleurs 80% des jugements, le plus fort taux enregistré depuis 20 ans.

Altares évoque également le chiffre de 63.000 entreprises « zombies » qui devraient jouer leur survie au moment de l’arrêt des aides gouvernementales.

La vigilance est donc à privilégier par les entreprises tout au long de l’année en restant attentifs à l’ensemble des signes de tension de trésorerie montrés par leurs propres clients afin d’adapter au mieux leur politique commerciale. Les relances en amont des échéances permettent de détecter assez tôt les difficultés. C’est une des valeurs ajoutées de nos actions pour d’une part, permettre à nos clients de se concentrer sur leur développement commercial de manière pérenne et d’autre part, de maintenir leurs propres bonnes pratiques de paiement en accélérant le recouvrement des factures clients et limiter ainsi l’impact du crédit interentreprises sur leur propre trésorerie.